Montée en puissance d'Internet, migration des budgets publicitaires et des petites annonces vers les médias électroniques, désaffection du jeune public pour l'écrit, culture du tout-gratuit... Telles sont quelques-unes des tendances lourdes de la révolution en cours de la presse écrite qu'analyse le journaliste Bernard Poulet.
Ancien du «Matin», Bernard Poulet a exercé à «Courrier International» comme rédacteur en chef. Il dirige aujourd'hui la rubrique Idées de «L'Expansion». Il est l'auteur d'une autre enquête: «Le Pouvoir du Monde. Quand un journal veut changer la France», publié à La Découverte en 2004. Dans un entretien sur le site Bibliobs, il dresse à propos de son livre un état des lieux très pessimiste de la profession de journaliste :
Bernard Poulet : "L'arrivée de la digitalisation a produit sur le journalisme le même effet que la mondialisation sur les classes moyennes. La révolution digitale dans la presse, c'est l'euthanasie à terme de la classe moyenne des journalistes".
Le Nouvel Observateur.- Comment ça?
B. Poulet.- La profession est en mutation. On voit grandir une masse d'OS de l'info qui alimentent les tuyaux de l'information rapide. Et à côté de cela, on aura des journalistes qui apporteront une plus-value, avec une véritable expertise et une grande qualité d'écriture. Ceux qui représentent la classe moyenne, qui ont fait le gros des rédactions, à laquelle j'appartiens, vont être broyés. Je crois que les journalistes qui surnageront sont appelés à devenir leur propre marque.
Des États-Unis à l'Europe et à la France, Bernard Poulet dresse le constat d'une industrie sinistrée, qui, se voyant doublement délaissée par le public et les annonceurs, ne fait plus assez de bénéfices pour rester viable et accumule les plans de rigueur et les licenciements, quand ce ne sont pas les faillites.
L'idéologie " libertaire " qui accompagne le triomphe d'Internet fait parfois rêver d'une autre manière de communiquer. Bernard Poulet montre qu'elle n'est souvent qu'un paravent derrière lequel s'édifient de puissants monopoles économiques pour lesquels l'information n'est qu'un produit d'appel parmi d'autres.
La révolution numérique des médias masque selon lui un autre bouleversement, amorcé bien avant Internet, mais tout aussi ravageur, et dont les effets se combinent désormais l'intérêt de nos sociétés pour l'information s'érode irrésistiblement.
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